(Nota bene : cette note a été écrite le 8 octobre et devait être mise en ligne le lendemain. Mais le 9 octobre, à la place, vous aviez eu ça !)
A l’instar du livre « Le secret », « 99 F » vient aussi d’être adapté au cinéma. Je ne vais pas aller voir le film, mais je viens de finir le livre.
L’histoire :
La hype, le business, les putes et la coke font partie de
l’univers d’Octave Parango, concepteur-rédacteur chez chez Rosserys &
Witchcraft, filiale française d’une grande agence de pub internationale. Son rôle
est d’écrire des slogans et d’abuser ainsi toutes les ménagères de moins de
cinquante ans de la terre en transformant leur fantasmes en actes d’achats :
une activité éminemment frustrante dont le mensonge et l’illusion sont les
moteurs créatifs.
Le narrateur est écoeuré par son boulot et cherche à se faire
virer. Il rappelle combien la publicité se rapproche de la propagande, compare
les patrons d’agence à des chefs d’états-majors menant la troisième Guerre
mondiale… Un jour, cocaïne aidant, il pète les plombs et propose une campagne
déplorable au directeur du marketing d’une grosse boite d’agroalimentaire (« Madone »…
un clin d'oeil évident à Danone, l'un
des plus gros clients du réseau Young & Rubicam). Dès lors, sermonné par
ses supérieurs, il se met à déblatérer sur sa profession, à en décrire les
travers dans une sorte de confession-délation drôle et déjantée.
L’avis de Lady
Et puis, le film est sorti. Avec aux commandes Jean Dujardin. On
a commencé à reparler du livre… Et comme en ce moment, je suis livrosore, je me
suis dit « pourquoi pas ? ». L’univers de la pub ne pouvait que
m’intéresser… mais j’attendais de voir l’histoire et le style d’écriture.
Dès les premières pages, dès les premières lignes, j’ai été séduite.
L’impertinence et l’hypocrisie d’Octave sont absolument
jubilatoires et l’écriture est impeccable, un vrai sens de la formule…
évidemment. Beigbeder dénonce avec humour et fracas un système capitaliste,
mercantile et consumériste. Tout le monde en prend pour son grade : les
annonceurs, stupides et suffisants, qui passent leur temps à vouloir étonner
les consommateurs tout en leur demandant avant leur avis ; les créatifs,
surpayés et frustrés, toujours à la limite de la folie ; les commerciaux,
arrivistes et aigris (quoi ? moi, j’suis comme ça ?)…
Et la réalité a rattrapé la fiction : Frédéric Beigbeder, à
l’époque concepteur-rédacteur à l'agence Young & Rubicam, a effectivement
été licencié dès que son boss a découvert les épreuves di livre. Ce que le
narrateur annonçait en ouverture de son oeuvre, l’auteur l’a vécu dans la vie
réelle.
La note de Lady :
16/20
Extraits... délicieux :
> « Je me prénomme Octave et m’habille chez APC. Je suis
publicitaire : eh oui, je pollue l’univers. Je suis le type qui vous vend de la
merde. Qui vous fait rêver de ces choses que vous n’aurez jamais. Ciel toujours
bleu, nana jamais moches, un bonheur parfait, retouché sur PhotoShop. »
> « Tout s’achète : l’amour,
l’art, la planète Terre, vous, moi. »
> « Tout est provisoire et tout s’achète. L’homme est un produit
comme les autres, avec une date limite de vente. »
> « La mort est le seul
rendez-vous qui ne soit pas noté dans votre organizer. »
> « L’euro a été inventé
pour rendre le salaire des riches six fois moins indécent. »
> « L’avantage avec la
nouveauté, c’est qu’elle ne reste jamais neuve. Il y a toujours une nouvelle
nouveauté pour faire vieillir la précédente. »
> « Pour créer des besoins, il faut attiser la jalousie, la
douleur, l’inassouvissement. »
> « Pour réduire l’humanité en esclavage, la publicité a choisi le
profil bas, la souplesse, la persuasion. »
> « Ce sont toujours les gens animés des meilleures intentions qui
deviennent des monstres. »
> « Le monde est irréel,
sauf quand il est chiant. »
> « Si les hommes font tant de peine aux femmes, c’est sans doute
qu’elles sont tellement plus belles quand elles pleurent. »
> « La morale, c’est
peut-être ringard, mais ça reste encore ce qu’on a trouvé de mieux pour
distinguer le bien du mal. »
> « Si tu es au bout du
rouleau, alors, qui est à l’autre bout ? »
> « Après tout ce que les
hommes ont fait pour lui, Dieu aurait tout de même pu se donner la peine
d’exister, vous ne croyez pas ? »
Bibis Réclame
P.-S. 1 : Si vous avez été ou si vous allez voir le film, je veux bien votre avis !
P.-S. 2 : Saviez-vous que Frédéric Beigbeder fut le conseiller de Robert Hue
lors de l’élection présidentielle française de 2002 ?